Les États-Unis en photo, qu'en imagineriez-vous a priori ? L'étendue, l'immensité sans doute, une nature hostile sur laquelle, par endroits, s'est bâtie une civilisation riche, des constructions à l'image du néolibéralisme effréné qui la gouverne... Dans le travail de Christian Delorme, il y a tout cela, et plus.
Le regard du photographe a capturé des images du pays de la superpuissance en nous emmenant au-delà de nos clichés d'Européens. La beauté formelle des paysages urbains, implacable, ne parvient pas à supplanter la force d'une dialectique tissée sous nos yeux entre création et destruction. Des maisons abandonnées semblent ironiser sur un esprit de conquête inconséquent. Des moyens de locomotion grandioses, des constructions fabuleuses paraissent servir au gagne-pain de vies que l'on n'envie pas. Le plus souvent, la présence humaine rend criante l'absence d'échanges, si bien que la réalité photographiée se prend à imiter l'atmosphère irréelle d'un tableau de Delvaux. L'activité des hommes déploie en grand à la fois sa puissance et son caractère vain. Mais que l'on ne s'y trompe pas, c'est un amoureux de ces lieux qui nous invite à contempler un univers fantasmé par tous.
L'artiste s'intéresse à ce pays de grandiloquence depuis une vingtaine d'années, en particulier à travers sa culture littéraire et cinématographique. Pour son deuxième périple sur les traces des romans de Jim Thompson,Joe R Lansdale,James Crumley il a traversé plusieurs villes des états frontaliers avec le Mexique avant de faire escale à Las Vegas.
En empruntant son parcours, nous découvrons la vision personnelle d'un passionné de culture nord-américaine, qui nous donne à voir la vie d'un peuple, en saisissant dans le même temps les archétypes et la singularité de ces mondes rencontrés.